lundi 27 avril 2009

Les SSII – la particularité de ce secteur d’activité

Par Alain OVADIA,

Les SSII sont des Sociétés de Services en Ingénierie Informatique.

Le propre de l’activité d’une SSII est de missionner ses salariés auprès de clients pour la réalisation de mission d’une durée plus ou moins longue.

C’est donc en fonction des contrats clients dont elle dispose qu’elle peut positionner ses salariés et donc facturer ses prestations auprès du client.

La particularité de cette activité repose sur le fait que, conformément aux dispositions du Code du Travail, la SSII doit donner du travail à ses salariés, lesquels sont rémunérés selon les dispositions du Code du Travail. Les contrats de travail sont à durée indéterminée et concerne essentiellement des Cadres.

Elle se doit donc de donner des missions à ses salariés et se doit de les rémunérer.

Toutefois, cette activité, totalement dépendante des clients (les banques, les compagnies d’assurances, etc…) dispose d’une vraie particularité qui la distingue des sociétés de travail temporaire. Lorsqu’un salarié n’a pas de mission chez un client, l’employeur maintient le salaire et l’ensemble des droits ouverts aux salariés (acquisition CP, RTT, etc…).

Ainsi, si un salarié se trouve en intermission – c’est-à-dire que la SSII n’a pas de contrat client lui permettant de positionner son salarié et donc être en mesure de facturer un client – la SSII supporte l’intégralité du salaire et des charges afférent à l’emploi de son salarié.

C’est donc un secteur d’activité qui souffre lorsque les clients – grands comptes – gèlent leurs budgets.

Nous le constatons particulièrement dans le secteur bancaire et le secteur automobile.

L’idée qui préserverait ce secteur d’activité et permettrait ainsi de pérenniser les emplois portent sur la « qualification et le traitement de l’intermission ».

En effet, les SSII se voient souvent contraintes lorsque le marché se tend – c’est ce que nous voyons depuis plusieurs mois - de mettre en place des Plans de Sauvegarde de l’Emploi massifs.

Le fonds de commerce d’une SSII, ce sont ses compétences, donc les femmes et les hommes qui la composent.

Or, si la SSII ne peut facturer faute d’un carnet de commande suffisant mais qu’elle se doit de rémunérer des salariés pour lesquels elle ne peut leur fournir un travail, le déséquilibre que cela entraîne est lourd selon le taux d’intermission que celle-ci supporte.

C’est la raison pour laquelle des PSE d’envergure sont mis en place dans notre secteur d’activité.

La conséquence d’un PSE entraîne inévitablement une croissance du chômage dans un secteur d’activité où les SSII sont pourtant des recruteurs reconnus.

Pour pérenniser les emplois et permettre aux SSII de conserver leurs salariés alors qu’elle ne dispose pas de mission pour certains d’entre eux, l’idée serait – spécialement pendant la période d’intermission – de créer une indemnité au profit du salarié qui représenterait 99,99 % du salaire net du salarié et qui viendrait remplacer le salaire au sens propre du terme sachant que l’indemnité ne serait pas soumise à cotisation ni à charges patronales.

En contrepartie, la SSII s’engage à ne pas licencier (PSE).

Ainsi, cette mesure permettrait aux SSII :

- de ne pas mettre en œuvre des PSE de grandes ampleurs, avec la difficulté liée aux critères de licenciement dont il n’est pas reconnu de plus que l’intermission soit un critère,

- donc de préserver les emplois,

- de ne pas léser les salariés en intermission qui conserveront leurs droits à 99,99 %.

jeudi 2 avril 2009

La politique étrangère d'Obama: nouvelle donne géopolitique ?

Par Jacques Soppelsa,

La «géopolitique», on le sait, est une discipline, sinon une science, qui tente de relier entre eux les principaux facteurs dynamiques rendant compte de l’organisation du monde pour aboutir à la synthèse d’une situation politique existante et de ses potentialités («Lexique de géopolitique».Dalloz) Et, parmi ces facteurs, les géopolitologues s’efforcent de distinguer les «tendances lourdes » (facteurs relativement stables) des changements conjoncturels, les « variables ».

Confronté à l’interrogation liminaire « Obama, une nouvelle donne au plan de la politique étrangère? », et au delà des imprécisions incontournables et des dangers de la prospective, notre sentiment penche indubitablement vers la pérennité et le rôle majeur de certaines « tendances lourdes », même si quelques éléments contemporains sont loin d’être négligeables pour, sinon bouleverser, du moins moduler, ici ou là, l’impact desdites tendances lourdes.

1) De quelques tendances lourdes:

En la matière, il ne semble pas totalement incongru de privilégier trois facteurs : le poids de la « destinée manifeste » ; la pérennisation de certaines priorités spatiales », de points d’ancrage hérités du système bipolaire, voire quasi séculaires; la poursuite de la doctrine stratégiques affichée depuis une bonne génération.

A) De la Destinée Manifeste :
On a pu souligner naguère que les Etats-Unis étaient fondamentalement marqués par un triple héritage britannique : l’esprit de liberté (« A is America, land of the free»), l’esprit d’égalité et l’esprit de religiosité.

A l’heure actuelle, sur ce dernier point, et contrairement à ce que l’on peut observer dans maints pays chrétiens d’Europe Occidentale, l’Amérique est plus que jamais imprégnée de religiosité. Avec un puissant corollaire, le rôle, direct ou indirect, du facteur religieux dans la géopolitique nord américaine, au plus haut niveau.

A travers les siècles, l’esprit de religiosité (et sa petite sœur, l’intolérance) ont régulièrement alimenté l’histoire des Etats-Unis. Il suffit de lire ou de relire les discours d’intronisation présidentiels ou les Messages sur l’état de l’Union; tous font explicitement référence («God Bless America»), à ce que Roosevelt appelait le « God Stuff », la sensibilité bigote. Avant de laisser sa place à Eisenhower, Truman, évoquant la Guerre Froide en janvier 1953, s’adresse exclusivement à Dieu, pour lui promettre, que «nous vaincrons jusqu’à Toi et pour Ta Gloire ». Ike rétorque : « Mes compatriotes, je vous demande de vous incliner. Dieu tout puissant, nous t’implorons et nous te proposons notre complet dévouement au service de Ton peuple, présent aujourd’hui devant nous".

Ronald Reagan rappelait, dans son premier message sur l’état de l’Union: «Nous sommes la Nation de Dieu, et je crois profondément que Dieu nous a prédestinés à être libres « (C’est dans le même esprit qu’il désignera l’Union soviétique comme «l’Empire du Démon».

De la doctrine Monroe au message présidentiel de Barack Obama, via les écrits d’un O'Sullivan (1839, the Great Nation of Futurity), le concept de «destinée manifeste» est permanent dans l’histoire des Etats-Unis ; une destinée manifeste que l’on a vu resurgir de manière plus éclatante encore dans la bouche de George W.Bush en 2004 : face à l’hypothèse des menaces potentielles et plurielles sécrétées par les Etats de l’Axe du Mal, il n’hésite pas à réaffirmer avec force : « bénéficiant de multiples vertus démocratiques, les Etats-Unis ont un constant devoir moral à l’égard de l’humanité »

B) de la pérennité de certains points d’ancrage :

En changeant d’échelle,(une notion capitale en géopolitique), certains points d’ancrage demeurent pérennes depuis au moins, un demi-siècle. A titre d’exemples, on peut citer Taïwan ou Panama et, plus significatifs encore, dans des contextes spécifiques, Israël et Cuba.
Israël : la protection nord américaine lui est acquise sans réserve depuis la création de l’Etat hébreu. Une protection partiellement liée, certes, au rôle nullement négligeable de AIPAC (American Israel Political Action Committee) à Washington.
Une protection qui génère aussi toute une gamme de corollaires : intégration de Tel-Aviv dans le schéma de la «Missile Defense» (cf.infra); poids dans les relations «irano américaines» ; (on a du mal à considérer, sauf attitude suicidaire, la posture de l’actuel Président iranien à l’égard d’Israël comme autre chose qu’une stricte gesticulation diplomatique!); élément majeur de la question proche orientale et des relations bilatérales ou multilatérales entretenues par Washington vis-à-vis des puissances arabes de la région ; question palestinienne…

Cuba : depuis plus d’un siècle, la Havane occupe une place à part dans la politique étrangère des Etats-Unis à l’échelle de la Caraïbe et du Golfe du Mexique, ce fameux « lac américain » cher à Reagan. Ancrée au cœur de l’arrière cour des Etats-Unis, Cuba occupait déjà une place originale dans les préoccupations des locataires de la Maison Blanche au début du XXème siècle. Songeons aux propos de Théodore Roosevelt à son égard : «je suis tellement fâché contre cette infernale petite République de Cuba que j’aimerais qu’elle soit rayée de la carte. Tout ce que nous voulons d’eux, c’est qu’ils se comportent bien, qu’ils soient prospères et heureux, de façon à ce que nous n’ayons pas besoin d’intervenir. Et maintenant, voilà qu’ils veulent commencer une révolution complètement injustifiée et inutile, et les choses vont devenir si compliquées que nous serons obligés d’intervenir, ce qui convaincra immédiatement tous les idiots soupçonneux d’Amérique du Sud et d’Europe qu’après tout c’est ce que nous voulions » !Cuba a aggravé son cas avec la révolution castriste de 1959. On connaît la suite, des rampes de missiles soviétiques sous Khrouchtchev jusqu’à l’adoption de la loi d’embargo « Helms Burton ».

C) La poursuite de la doctrine stratégique affichée depuis l’effondrement du système bipolaire :

Depuis la disparition de l’URSS et l’abandon, sous le mandat présidentiel de George H. Bush, du GPALS (Global Protection Against Limited Strikes )(délaissé par Clinton au milieu des «ninetees») la doctrine de «Missile Defense» a pris le relais du programme gigantesque élaboré sous Ronald Reagan il y a un quart de siècle . A vrai dire, GPALS et Missile Defense ne se différencient que par quelques éléments d’ordre strictement techniques. Leurs objectifs géostratégiques et, a fortiori, géopolitique) étaient quasiment identiques. Les efforts de la Maison Blanche, via le Pentagone, sont concentrés désormais sur le développement et la fabrication d’outils stratégiques adaptés aux nouvelles menaces, tout particulièrement celles qui sont susceptibles de venir des «Etats préoccupants » de l’Axe du Mal.Ces derniers (et à notre connaissance, l’Administration Obama n’a pas invalidé le concept) n’ont pas les capacités inter balistiques de feu l’Union Soviétique. Ils ne peuvent pas, que cela soit à Téhéran ou à Pyong Yang, eu égard au contexte géographique, menacer directement, et d’une manière crédible, le territoire américain. Ils peuvent, en revanche, susciter de sérieux soucis aux alliés des Etats-Unis ! D’où l’adoption, depuis bientôt deux décennies, du « National Missile Defense Act » prônant le déploiement d’une défense antimissile de théâtre. Programme mis en place par Bill Clinton, accéléré par Bush Junior au lendemain du drame du 11 Septembre et nullement remis en question par Obama. . Un programme réaffirmant la volonté des Etats-Unis de garantir la protection du parapluie antimissile américain (en le modernisant) à leurs alliés. Se pose aujourd’hui, non pas la question de la poursuite dudit programme mais celle de l’automaticité de ladite protection. Le programme « Missile Defense » révèle un air de famille assez poussé avec l’Initiative de Défense Stratégique. Mais son gabarit est nettement plus réduit. La «MD» vise explicitement des agresseurs potentiellement beaucoup plus modestes que l’ex adversaire soviétique.


2) De quelques variables contemporaines:

Que l’on nous permette ici, à l’échelle de la planète, d’évoquer une hypothèse prospective quelque peu hétérodoxe. La situation financière des States et le budget indispensable, pour les prochaines années, à la concrétisation du programme «interne», sauf miracle de type «multiplication des pains», devraient contribuer, nous semble t-il, à quelques choix drastiques incontournables au plan de la politique étrangère.
Rappelons quelques chiffres, révélateurs de l’ampleur de la crise :

Le déficit américain devrait atteindre en 2009 les 1200 milliards de dollars, soit plus de 8% du PIB. Si l’on ajoute à ce chiffre colossal le coût du plan de relance de Barack Obama, qui devrait s’élever à quelques 800 milliards de dollars, on pourrait atteindre, fin 2009, un déficit budgétaire supérieur à 12% du PIB !

Quant à la balance commerciale des Etats-Unis, elle est plus déficitaire que jamais. En 2008, elle a atteint 750 milliard de dollars, soit 5% du PIB. En termes clairs, si l’Administration Obama veut effectivement traduire dans les faits les promesses du candidat au plan social et sociétal, pour répondre à la vague inouïe d’espoir suscitée le 4 novembre, il est probable qu’au plan de la géopolitique externe, elle ne soit conduite à tourner le dos à la récente posture adoptée par les théoriciens du chaos et les partisans des «Etats-Unis gendarmes du monde », et à se désengager progressivement, ici ou là (y compris en Afrique subsaharienne ou aux marges de l’Europe.

L’expansionnisme euphorisant cher à un Francis Fukuyama est d’ores et déjà obsolète. Au pire, Washington pourrait être amené à se replier sur le territoire nord américain (en ressuscitant l’antique politique isolationniste et en concrétisant la théorie «pessimiste» d’un Paul Kennedy), ce que je ne crois guère).

Le maintien de la présence U.S , au moins à court terme, en Irak et, a fortiori, en Afghanistan, pour toutes les (bonnes) raisons que l’on sait, demeure une option incontournable.
Avec un corollaire de taille : Washington devrait, plus que jamais, multiplier les initiatives pour «partager le fardeau» avec ses Alliés, via, notamment, les nouvelles missions dévolues à l’OTAN ; soit, plus vraisemblablement, en changeant radicalement son échelle d’interventionnisme.

Obama pourrait être tenté, parallèlement audit partage du fardeau de concentrer ses efforts (à tous les sens du terme) sur l’hémisphère américain. Le nouveau Président, paradoxalement en apparence, redonnerait ainsi plus ou moins sciemment, force et vigueur à la bonne vieille doctrine de «l’Amérique aux Américains», affirmée il y a bientôt deux siècles par le Président James Monroe, au «bénéfice» des Etats latino américains.

Quant à l’Europe, elle pourrait alors être amenée à conforter ses liens avec Moscou, perspective déjà caressée, apparemment, par Angela Merkel.

Mais ceci est une autre histoire.